Chantal Sallustin

(Quelques œuvres de Chantal Sallustin)

Les Voies de la Ville

Née à Bruxelles en 1957, Chantal Sallustin est diplômée en Arts Plastiques et Gravure. Elle a enseigne le dessin scientifique et le dessin d’après nature à l’lnstitut Bischoffsheim à Bruxelles.

L’artiste affectionne la xylographie ou gravure sur bois. C’est le système d’impression le plus ancien. Via le bois puis le plomb, il est à la base de la typographie de Gutenberg.

L’on y assure une gravure en relief (non en creux) ou le trait dessine sur la planche est «épargne», tandis que Ies fonds sont creusés. Le trait ainsi obtenu est généralement à la fois épais et net. Chantal Sallustin dit: «Dans un premier temps, je grave dans le bois de manière aléatoire tantôt en suivant le fil du bois, tantôt en contredisant celui-ci. Dans un second, j’imprime sur un papier fin et translucide. La lumière comme filtre assure une mise en contraste de la trace rigide et compacte du bois avec la gracilité de la feuille, réceptacle final du travail». Dans l’un de ses travaux précédents, elle jouait de formes concentriques compressées à l’aide de matrices de disques 33T, colorant le support en tons primaires d’après l’empreinte des spires.

Le dessin scientifique est et reste au cœur de son imaginaire. De par sa nature­même, le thème de la Ville s’y trouve intimement lie. Avec Ies rouges et Ies gris en dominants, travaillés à la mine de plomb ou à l’encre, la dessinatrice donne vie à des formes souvent orthogonales. Sont-ce des tissus urbains avec leurs réseaux d’allées, chemins, et rues scandant places et parcelles de terrains, en ce compris leurs courbes de niveau ? Un univers en géométrie plane fait de lignes étalonnées et intersections se livre au regard du spectateur oiseau. Des compositions antérieures invitaient a de saisissantes déambulations au travers de décors suggérant rouille, fer et verre. Ossatures ou reliques ? Vestiges de cités médiévales ou zonings postindustriels ? Cathédrales, gargouilles et flèches parlent d’un paradis à l’opium perdu… au profit d’un autre, tout aussi aliénant. Celui des ateliers urbains des Temps Modernes, leurs cadences inhumaines, leurs orgueilleuses cheminées cracheuses de funestes fumées.

Chantal Sallustin confère à son travail sur tableau un même caractère «opératif». Elle Ies conçoit en façonnant des textures ou strates successives de papier estampe et de dentelles en plans découpés. À coups de brosses chargées d’encre, elle inflige au papier des boursouflures qui le déchirent et qu’elle parachève au grattage.

Jouant de ces transparences, elle souligne au fusain une forme ou l’esquisse d’une aspérité. Autant de marques et accents vécus d’une sensation ou d’une émotion de l’instant. Le tout est maroufle et monte sur châssis toile.

Chantal Sallustin : une artiste qui ne cesse de remettre son art en question. Le bonheur qu’elle éprouve à la recherche des ressources inépuisables de l’estampe est communicatif pour Ies visiteurs de l’exposition. Gageons qu’à la lumière de cette clef de lecture, «Ies Voies de la Ville» ne leur resteront pas impénétrables !

Michel Van Lierde, chroniqueur d’art, collectionneur. Novembre 2017


http://www.chantalsallustin.be/index.html